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Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/22

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dire au sujet considéré comme objet : telle, par exemple, l’idée de durée qui, pour autant qu’elle appartient au sujet, reçoit de sa réalité, devient une chose réellement existante dans le sujet réel, au lieu de n’être qu’une idée dans l’idée du sujet. Ainsi c’est bien d’une manière tout à fait générale que la croyance nous fait passer de l’abstraction à la réalité, de la logique à l’ontologie.

Demandons-nous quels sont les titres de la croyance à notre accueil ? Toute différente qu’elle soit de nous-mêmes, en tant que nous sommes l’idée d’un sujet, elle est pourtant nous-mêmes en un autre sens. Et de ce que la croyance est encore nous-mêmes, il s’ensuit que nous ne pouvons lui refuser notre assentiment qu’en paroles, puisqu’autrement nous nous mutilerions, et à vrai dire nous nous condamnerions à périr. Selon la parole de Jacobi, « nous sommes tous nés dans la croyance et en elle nous devons vivre et mourir ».

Elle vient de jouer dans la constitution de la connaissance un rôle capital. Si décisif qu’ait été ce rôle, nous allons encore avoir à lui en faire jouer un autre, car toutes les difficultés que soulève la possibilité de la connaissance ne sont pas résolues. Il y en a une qui demeure, et non moins grave que la précédente, quoique entièrement différente.

Nous avons eu à donner une portée objective à la méthode des idées ; il s’agit maintenant de savoir si cette méthode elle-même, à la prendre en soi et sans s’inquiéter de sa portée objective, est vraiment possible. Sans doute, si l’on procède à l’enchaînement des idées à la façon géométrique et cartésienne, sans rien imaginer et sans rien omettre, le scepticisme objectera faussement que les divers esprits restent exposés à ne pouvoir se mettre d’accord entre eux : de tels enchaînements ont une valeur universelle (Manuel de philosophie moderne, p. 400). Mais il est une objection qui se tire de ce qu’il y a de plus intime dans la pensée et dans la raison. Ce ne sont pas divers esprits individuels qui risquent de ne pas s’accorder entre eux : c’est dans un seul et même esprit que le désaccord se produit, c’est la raison qui se contredit elle-même. Il est malheureusement aisé de s’en apercevoir. Une fois que la croyance nous a fourni le