Aller au contenu

Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tive et limitée. De sorte que, comme connaissant, le moi est absolu et relatif, infini et fini. Enfin le moi est libre, car la volonté nous apparaît comme indépendante des choses extérieures et, pour passer à un dernier point, elle est comprise dans un ordre qui la dépasse et de ce chef nécessaire. Le sujet est donc fait d’un tissus de contradictions.

Le cas de l’objet n’est pas différent. Le considère-t-on en tant qu’intelligible ? Alors sa durée et son étendue le montrent comme constituant un bloc ; il est donc indivisible et infini. Cela n’empêche pas que comme perçu par les sens il est divisible et limité. En tant qu’il se meut, il n’est pas moins contradictoire, car nous percevons le fait du mouvement et pourtant le mouvement suppose la division à l’infini du temps et de l’espace, ce qui le rend impossible à comprendre. Ainsi il en est bien comme nous le disions, la contradiction est partout, tant dans l’objet que dans le sujet.

Dira-t-on que la contradiction n’est dans les choses que parce qu’elle est dans les idées, et qu’il suffit, pour remédier au mal, de renoncer aux idées ? Deux manières de procéder se présenteraient alors comme possibles : l’une consisterait à poser le monde en soi sans passer par l’intermédiaire des idées pour le connaître. Le monde serait alors le sujet unique, infini, éternel, immuable, etc. Mais il resterait à rendre compte des êtres multiples et finis, des modes en un mot, ou plutôt de l’illusion par laquelle nous croyons trouver dans le monde de telles choses. L’autre manière de procéder serait de laisser de côté l’étude et la discussion des idées pour se contenter de l’expérience et d’une systématisation expérimentale et relative. Mais, outre que cette procédure dérivée de celle des savants positifs serait une renonciation à la science de la science, à la philosophie, ce serait encore une duperie, parce que les opérations de la méthode expérimentale supposent l’esprit et la raison, et que si ces deux principes de tout savoir sont des sources de contradiction, on peut bien feindre de ne pas voir ces contradictions, mais non réussir à les supprimer effectivement. Il n’y a donc, en somme, aucun moyen de ne pas compter avec les contradictions de la raison. Devant cette conclusion bien démontrée, quel parti