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Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/33

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tandis que, au contraire, la théorie était presque tout, en matière de morale, dans le Manuel de philosophie moderne, la part faite à la liberté a considérablement grandi dans la morale et la politique du Manuel républicain. Peut-être paraîtrait-il plus régulier de parler de cet ouvrage non comme d’une œuvre appartenant à la première période de la pensée de M. Renouvier, mais comme marquant, relativement aux matières qu’il traite, un passage de la première période à la seconde. Toutefois cette question d’ordre extérieur importe assez peu et il y a bien quelque avantage à rassembler toutes les idées morales de l’auteur antérieures à l’adoption par lui de la morale kantienne. Ce n’est pas d’ailleurs sur des questions de morale que s’est produite la grande crise de son esprit. Au moment de cette grande crise il en est venu sans doute à reconnaître une plus haute importance aux choses morales : mais on ne peut pas dire qu’il les ait en elles-mêmes comprises d’une manière très nouvelle. Si le Manuel républicain compte dans la période de transition, c’est parce qu’il est un livre consacré exclusivement à la morale et parce qu’il est significatif de voir un esprit préoccupé surtout jusque là de spéculation s’intéresser assez aux choses morales pour vouloir en faire l’objet de tout un ouvrage et d’un ouvrage qui fût en même temps une action. Quant à son contenu, le Manuel républicain marque certes un progrès dans les tendances individualistes et libertistes de l’auteur ; c’est cependant sans rompre avec la théorie morale esquissée dans le Manuel de philosophie moderne.

Vous pourrez voir dans la notice de J. Thomas l’histoire extérieure très intéressante du Manuel républicain publié en mars 1848 sous les auspices du Ministère de l’Instruction publique et occasion, quelques mois plus tard, de la chute du ministre Hipp. Carnot. Nous n’avons, quant à nous, qu’à en extraire les idées principales. Le principe de la morale n’est plus cherché délibérément comme autrefois dans l’accord de l’individu avec un ordre qui le dépasse. La moralité est fondée sur quelque chose qui est dans l’individu, qui y est du moins idéalement et ne fait que développer l’individu et le rendre plus lui-même, dans la perfection, c’est-à-dire dans le développement