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Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/45

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lés à durer ; aussi nous en tiendrons-nous, sans nous engager dans une analyse suivie, à relever un certain nombre de points intéressants. Le problème général de l’ontologie est compris exactement comme il l’a été dans le Manuel de philosophie moderne, et il n’y a pas à y revenir. Mais voici des détails dignes de remarque. L’existence en soi des corps comme sujets étendus définis et auparavant celle de leur forme indéfinie, l’espace, sont affirmées avec autant d’insistance que jamais. Kant est blâmé d’avoir cru que l’espace, parce qu’il est une forme de la sensibilité, ne peut pas être une chose. Contre lui s’élève une raison invincible : savoir la foi commune des hommes (527b milieu). Pourtant M. Renouvier reconnaît que, si la réalité de l’espace s’affirme inévitablement, les difficultés commencent quand on envisage l’application des catégories à l’espace. L’espace donne lieu à une antinomie qu’on peut énoncer en employant la seule idée de relation avec ses modes, c’est-à-dire une idée commune à toutes les catégories et antérieure à elles : l’espace, dira-t-on, est composé et cependant il ne peut pas l’être parce qu’il n’a pas de parties simples. Si l’on se réfère aux catégories, l’antinomie prend un sens plus frappant et la contradiction apparaît comme plus violente encore : elle se présente dans un langage qui jouera désormais un rôle capital dans les ouvrages de M. Renouvier. L’espace a des parties, l’espace est divisible : cependant il ne peut pas l’être car « si l’espace est réellement divisible, il contient un nombre de parties plus grand que tout nombre assignable, c’est-à-dire un nombre qui n’est pas un nombre » (528a bas). Ajoutons que, un peu plus loin, l’idée de l’impossibilité du nombre infini reçoit une nouvelle application dans la question de savoir si la somme des êtres donnés dans le monde est limitée ou illimitée. Qu’elle soit limitée, alors on demandera : pourquoi tel nombre plutôt que tel autre ? Cependant, si elle est illimitée, elle constituera un nombre infini ; or « comment un nombre infini peut-il avoir une existence actuelle ? » (532b). Sans doute la solution générale des antinomies de la raison est encore l’acceptation des deux propositions opposées. Mais cette acceptation que nous avons déjà vu changer quelque peu d’aspect dans les articles Fatalisme et Panthéisme prend ici