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Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/52

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C’est ce que reconnaît la préface du Premier Essai qui a été écrite sur des souvenirs beaucoup plus récents et plus frais que le dernier chapitre de l’Esquisse d’une classification. Cette préface n’hésite pas à présenter le développement de la pensée de l’auteur comme ayant suivi depuis les Manuels une marche régulière et à définir le rôle de l’article Philosophie en l’appelant un anneau entre les premiers ouvrages de l’auteur et celui par lequel il inaugure sa nouvelle doctrine. De fait cette nouvelle doctrine est dans une large mesure ce qu’aurait pu attendre un lecteur attentif des ouvrages qui l’avaient précédée. Après l’avoir longtemps pressenti, l’auteur a compris que le principe de contradiction ne se laisse pas éluder ; il a choisi entre les thèses et les antithèses des antinomies de la raison, et il a choisi les thèses parce que le principe de contradiction lui imposait non seulement un choix quelconque, mais celui-là[1]. En conséquence de ce choix, il a adopté le relativisme et le phénoménisme vers lesquels on le voyait déjà incliner. Dans ce phénoménisme et ce relativisme il a trouvé un appui pour son moralisme. Enfin il a conservé d’une part, en l’éclaircissant et la développant, sa théorie de la certitude et de l’autre, cela va de soi étant donnée l’importance qu’il attache au principe de contradiction, il a conservé son rationalisme. Rien dans tout cela n’est propre à déconcerter le lecteur attentif dont nous parlons. C’est presque de plain-pied que nous entrons dans la philosophie des Essais en sortant de l’écrit qui l’a précédée immédiatement.

La préface du Premier Essai a pour objets principaux, et les deux objets sont liés, de nous apprendre comment l’auteur

  1. Le Savoureux (op. cit., p. 678 et la note 2, et p. 679) est d’une autre opinion. Selon lui « Le problème du sacrifice de l’infini s’est… certainement posé à Renouvier comme un problème moral », c’est-à-dire un problème intéressant les croyances morales « et les raisons intellectuelles, par cela seul qu’elles sont antérieures, n’ont pas servi à le poser. À tout le moins faut-il accorder qu’elles n’y ont pas suffi. À notre sens, ce sont des raisons très personnelles qui ont amené Renouvier à établir entre l’infinitisme d’une part, le catholicisme et le vertige mental d’autre part, une relation d’identité. » Renouvier a, au cours de 1851, soigné Lequier devenu fou et a senti la nécessité du finitisme comme rempart contre le mysticisme qui favorise le vertige mental.