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Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/54

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composant ensemble. Mais aussitôt on demandera et ce que nous composons ainsi et ce que c’est que cet acte de décomposer et de composer. Sur quel principe fonderons-nous une réponse ? Comme aucun principe n’est évident, c’est-à-dire incontesté et incontestable, nous serons condamnés à un procès à l’infini, à moins que nous ne préférions nous enfermer dans un cercle. C’est ce dernier parti qu’il faut prendre. Car non seulement on ne peut chercher un principe en remontant à l’infini : mais à commencer par le commencement qui paraît le plus indiqué, on commettrait une grosse erreur de méthode. On pourrait penser que l’acte de composer ou de décomposer étant un jugement, c’est-à-dire impliquant une affirmation et une croyance, il conviendrait de se demander tout d’abord ce que c’est que d’affirmer et de croire. Or ce serait là s’attaquer à un problème très complexe qui en suppose avant lui un grand nombre de plus simples, faute de la mention desquels il n’est pas lui-même soluble. Il suppose notamment des principes moraux (Logique, I, pp. 1 et 28). Ainsi nous ne pouvons prendre d’autre parti raisonnable que de nous enfermer dans un cercle, c’est-à-dire de supposer en commençant une foule de connaissances, de nous en servir pour passer à d’autres et d’employer celles-ci pour revenir enfin sur les premières. Mais s’il en est ainsi, si nous devons nous mettre d’abord au milieu de la raison, il est clair que nous ne pouvons plus aspirer à démontrer comme si nous partions d’un principe inébranlable. Nous ne pouvons que procéder empiriquement et historiquement : nous ne pouvons que raconter notre propre pensée, bref faire, comme M. Renouvier aurait pu dire avec Descartes, le roman de notre esprit. Seulement, quand le récit se fermera sur soi, nous nous trouverons posséder la science et avec nous la posséderont ceux qui se seront reconnus dans notre histoire.

Nous ne voulons pas nous arrêter longuement sur ce début. Nous ne savons pourtant si tout y est satisfaisant. Sans doute le cercle dont on parle est justement signalé comme inévitable : mais peut-être n’empêche-t-il pas l’emploi d’une méthode démonstrative ou du moins d’une méthode qui ne se contente pas de raconter et veut encore prouver : car l’idée aristotélicienne