Page:Hans Staden - Des hommes sauvages nus feroces et anthropophages, original 1557.pdf/110

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il m’aurait été facile de m’échapper, car nous n’étions qu’à dix milles de Brikioka ; mais je ne le fis pas à cause des prisonniers, dont quatre étaient encore en vie : je pensais en effet que, dans leur colère, les sauvages les massacreraient. Je pris donc la résolution de me reposer sur la Providence, et de rester avec eux pour les consoler. Les sauvages me traitaient très-bien parce que je leur avais prédit par hasard qu’ils rencontreraient l’ennemi ; et ils disaient que j’étais un meilleur prophète que leur tamaraka.


Comment les sauvages dansèrent autour de leurs ennemis, à l’endroit où nous campâmes le jour suivant.
CHAPITRE XLIII.

Le lendemain, les sauvages arrivèrent à une grande montagne, nommée Occarasu, qui n’est pas très-éloignée de leur village ; ils résolurent d’y passer la nuit. J’allai dans la cabane de Konyan Bebe, le principal chef, et je lui demandai ce qu’il avait intention de faire des Mamelouks. Il me répondit qu’ils seraient dévorés et il me défendit de leur parler, ajoutant qu’ils n’avaient qu’à rester dans leur pays au lieu de se réunir à ses ennemis pour lui faire la guerre. Je le suppliai de leur accorder la vie et d’en tirer une rançon ; mais il persista dans son dessein.

Il avait devant lui un grand panier plein de chair humaine, et était occupé à ronger un os. Il me le mit à la bouche, me demandant si j’en voulais manger. Je lui dis alors : A peine un animal sauvage en dévore-t-il un autre, comment mangerais-je de la chair humaine ? Puis il mordit dedans, en disant : « Jau ware sche. Je suis un tigre et je le trouve bon. » Alors je le quittai.