Page:Hans Staden - Des hommes sauvages nus feroces et anthropophages, original 1557.pdf/47

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Nous nous déterminâmes à nous y rendre pour voir si nous pourrions frêter un vaisseau portugais afin de gagner Rio della Plata, car celui qui nous restait était trop petit pour nous contenir tous. Quelques-uns des nôtres partirent avec le capitaine Salazar pour tâcher de gagner le fleuve, mais aucun n’y avait jamais été, excepté un nommé Roman, qui s’engagea à trouver l’ancrage.

Nous quittâmes donc le port, nommé Inbiassape, qui est situé par vingt-huit degrés au sud de la ligne équinoxiale, et nous arrivâmes, après environ deux jours de route, à une île nommée Insula de Alkatrases (isla de los Alcatrazes), située à environ onze milles de là : nous fumes obligés d’y jeter l’ancre, à cause des vents contraires. Cette île prend son nom d’une espèce d’oiseaux de mer, nommés alkatrases, qui y sont fort nombreux et fort faciles à prendre à cette époque, qui est celle où ils élèvent leurs petits. Nous allâmes à terre pour chercher de l’eau ; nous y vîmes quelques huttes abandonnées et des fragments de poterie que les sauvages qui les habitaient autrefois y avaient laissés ; nous trouvâmes aussi une petite source près d’un rocher. Nous tuâmes un assez grand nombre d’alkatrases, et nous prîmes leurs œufs que nous emportâmes à bord du vaisseau, où nous fîmes tout cuire, œufs et oiseaux. A peine avions-nous fini de manger, nous fûmes assaillis par un coup de vent du sud si violent, que nous eûmes beaucoup de peine à rester sur nos ancres, et nous craignîmes à chaque instant d’aller nous briser sur les écueils. Nous avions espéré entrer avant le soir dans un port nommé Caninee ; mais il était déjà nuit quand nous y arrivâmes, et nous fûmes obligés de nous éloigner de terre malgré le danger d’être à chaque instant submergés par les vagues, car elles sont bien plus fortes près de la terre qu’en pleine mer et loin des côtes.