Page:Hans Staden - Des hommes sauvages nus feroces et anthropophages, original 1557.pdf/59

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derrière un buisson, et un grand nombre des leurs qui les attendaient. Dès qu’ils me virent arriver ainsi porté, ils coururent au-devant de moi. Ils étaient ornés de plumes, selon leur usage ; se mordaient les bras, et me menaçaient comme s’ils eussent voulu me dévorer. Leur roi marchait devant moi, tenant en main la massue avec laquelle ils tuent leurs prisonniers. Il leur fit un discours, et leur raconta comment ils avaient pris le Perot, c’est ainsi qu’ils nomment les Portugais, et comment ils vengeraient sur moi leurs amis. Lorsqu’ils m’eurent placé près des canots, ils recommencèrent à me frapper du poing. Ils se hâtèrent de remettre leurs embarcations à la mer, car ils craignaient qu’on ne donnât l’alarme à Brikioka ; ce qui arriva en effet.

Avant de me placer dans le canot, ils m’avaient attaché les mains. Comme ils n’étaient pas tous du même village, chaque tribu fut mécontente de s’en retourner les mains vides, et commença à chercher querelle à ceux qui s’étaient emparés de ma personne ; quelques-uns, disant qu’ils avaient été aussi près de moi qu’eux, voulaient me tuer sur la place pour avoir de suite leur part.

Je priais en attendant le coup de la mort ; mais le roi, qui m’avait fait prisonnier, prit la parole, et dit qu’il voulait m’emmener vivant pour pouvoir célébrer leur fête avec moi, me tuer et, kawewi pepicke, c’est-à-dire faire leur boisson, célébrer une fête et me manger ensemble. Ils me mirent quatre cordes autour du cou, me firent monter dans un canot avant qu’il fut à flot, et le poussèrent ensuite à la mer pour retourner chez eux.