Page:Hans Staden - Des hommes sauvages nus feroces et anthropophages, original 1557.pdf/89

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que oui, mais que la Mussurana (ils nomment ainsi une corde de coton de la grosseur du doigt, avec laquelle on attache les prisonniers), n’était pas assez longue, et qu’il y manquait encore six brasses, ajoutant que je fournirais un meilleur repas, et faisant des plaisanteries comme s’il avait dû aller à une fête.

Ce malheureux m’affligeait : je cherchais à m’occuper en lisant dans un livre portugais que les Indiens avaient trouvé à bord d’un vaisseau dont ils s’étaient emparés à l’aide des Français. Je lui adressai de nouveau la parole, car les Marckayas sont les alliés des Portugais, et je lui dis : « Je suis un prisonnier comme toi, et je ne suis pas venu ici pour aider les sauvages à te dévorer, mais parce que mon maître m’a amené. » Il me répondit qu’il savait bien que les blancs ne mangeaient pas de chair humaine.

Je cherchai à le consoler en lui disant que son corps seul serait dévoré, mais que son âme irait dans un lieu de délices, où il trouverait les âmes des autres hommes. Il me demanda si c’était bien vrai, ajoutant qu’il n’avait jamais vu Dieu. Je lui promis qu’il le verrait dans l’autre vie.

Pendant la nuit il s’éleva un ouragan si violent, qu’il endommagea les toits des cabanes. Les sauvages alors me dirent en colère : « Apo Meireh geuppaw y wittu wasu immou. » C’est ce méchant homme