Page:Haraucourt - L’Âme nue, 1885.djvu/112

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


97
LES CULTES.

Tout s’en va. La raison tremble, l’amour s’effare,
Et le monde, toujours plus souffrant et plus vieux,
Entassant ses chagrins, grossit comme un avare
Le trésor de douleurs légué par les aïeux.


Donc, puisque nous voilà tout nus dans la nature,
Orphelins de la foi, seuls avec nos rancœurs,
Salut à toi, Beauté, religion future,
Dernier secours des dieux, recours dernier des cœurs !


Beauté, vertu palpable, esprit de la matière,
Sœur de la vérité, vierge mère de l’art ;
Beauté, splendeur du bronze et gloire de la pierre,
Culte saint des fervents qui sont venus trop tard !


Âme des corps sans âme et règle sans caprice ;
Germe et terme de tout ; force, but et moyen ;
Loi douce qui défends que l’univers périsse,
Suprême et seul amour qui fasses croire au bien !