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était bien embarrassé pour la caser. Mme W… pleurait ; elle ne comprenait pas qu’un acte d’humanité pût constituer un crime. Et quand on lui annonça qu’il fallait se séparer de son fils, elle tomba dans mes bras.

Quelques-uns des prisonniers me connaissaient. Un médecin. M. R…, me tendit la main ; plusieurs me félicitèrent, prenant au sérieux ce que le greffier avait dit de ma bravoure.

Un officier supérieur fit son entrée dans la rotonde. Aussitôt le porte-dossiers, pensant sans doute qu’un peu de zèle le poserait devant son chef, cria :

« — La femme Hardouin ! l’institutrice ; encore une institutrice, mais c’est affreux ! Et dire qu’elle dirigeait les mitrailleuses ! »

Puis, brusquement :

« — Qu’avez-vous fait de votre chassepot ? »

À cette provocation, je ne fut pas maîtresse de moi, et, le regardant en face, je criai : Vive la République ! C’était, pour lui, la réponse la plus désagréable.

— La malheureuse ! dit une voix derrière moi, on va la conduire à la fosse aux Lions.

Le docteur R… m’expliqua que la fosse aux Lions était une cave où étaient Louise Michel, Mme Millière et quelques autres.

— Je crois, ajouta-t-il, qu’on vous mènera plutôt aux Chantiers. Mais, madame, soyez prudente[1].

  1. La fosse aux Lions était une cave d’où les prisonnières avaient été retirées depuis quelques jours.