Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/85

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ne ferais à nul autre. Claire est sous l’impression que je suis une âme froide et inaccessible au sentiment. Sais-tu pourquoi ? Je ne me sens plus la force de l’embrasser, de frôler sa main, de la choyer comme je le faisais, lorsque nous étions à Québec. Je ne m’arrête plus à la regarder dans les yeux… J’ai peur d’une tendresse plus vive, plus entière, plus charnelle…

— Voyons ! Je crois que ces alarmes sont vaines. Les trois quarts de nos maux nous viennent de l’imagination, pas vrai ?

— Cela se peut.

— Mais elle, Claire, comment se fait-il qu’à vingt-six ans ?…

— Elle n’a jamais aimé personne.

— Jamais ! C’est impossible ! Cette femme ne peut pas ne pas avoir aimé. Sa voix, ses gestes, son regard, tout son être, jusqu’à la tournure de son corps, trahissent l’amour. Cela se voit, cela se sent.

— Je n’ai jamais rien remarqué de tel… Tu m’inquiètes, à la fin… Au fait, viens visiter Valmont : tu y verras dix ans de mon histoire écrite dans la pierre et l’acier. »

Ils se dirigèrent d’abord vers le centre du parc situé en face de la maison de Marcel. Ils entrèrent entre une double rangée d’érables