Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/20

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venir pour lui en faire une accusation, il en décline la responsabilité : « Chacun sait, dit-il, que le roi défunt ne lisait pas seulement mes gazettes et n’y souffrait pas le moindre défaut, mais qu’il m’envoyait presque ordinairement des mémoires pour y employer… Était-ce à moi à examiner les actes du gouvernement ? Ma plume n’a été que greffière… mes presses ne sont pas plus coupables d’avoir roulé pour ses mémoires… que le curé qui les lirait à son prône, que l’huissier ou le trompette qui les publierait. »

Renaudot gagna son procès, et il alla plus avant encore dans la faveur de Mazarin qu’il n’avait été dans celle de Richelieu.

Cette faveur de deux grands ministres ne dédaignant pas de s’appuyer sur un humble gazetier prouve assez que, des son origine, le journal fut une puissance. S’il en fallait une autre preuve, nous la trouverions dans les attaques furieuses dont Renaudot fut l’objet à l’occasion de sa gazette. En présence de ce nouveau succès, la violence de ses envieux ne connut plus de bornes ; toutes les armes leur étaient bonnes pour l’attaquer, le ridicule aussi bien que la calomnie. Ses tentatives pour faciliter les transactions et procurer au commerce les moyens d’écoulement qui lui manquent : honteux trafic ! Ses efforts pour venir en aide aux nécessiteux : infâme usure ! Il veut faire sortir de l’ornière l’art de guérir : charlatanisme ! Il donne gratuitement aux pauvres, avec ses consultations, les nouveaux curatifs que lui fournit la science : charlatanisme ! charlatanisme ! Pour comble, il se fait gazetier, courtier de nouvelles, l’équivalent de courtier d’amour !

L’envie ne s’arrête pas en si beau chemin ; elle va fouiller dans les plis les plus intimes de sa vie pri-