Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/31

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de la vouloir conserver quand la révolution eut ouvert l’arène à la discussion. Au milieu du déchaînement des passions, elle voulait, disait-elle, conserver « un caractère de vérité, de simplicité et de sagesse. » Mais elle comptait sans la force des événements et aussi sans la faiblesse humaine. Habituée à sa chaîne dorée, la Gazette ne pouvait que difficilement consentir à vivre de pair avec cette foule de journaux que chaque jour enfantait. S’il est beau d’être indépendant, il est bien doux d’avoir l’oreille du pouvoir, de jouer un rôle dans l’état.

La Gazette ne fit donc que changer de livrée, et dans la crainte, sans doute, qu’on ne l’accusãt de conserver au fond du cœur quelque reconnaissance pour le régime auquel elle devait sa fortune, elle s’écriait, le 22 janvier 1793 : « Le tyran n’est plus ! »

Mais notre intention, dans ce premier travail, n’est point de faire l’histoire des opinions ; notre unique but a été de suivre la marche de la presse périodique, et de montrer par quelles phases elle est arrivée à son universalité, à sa puissance actuelle. Le premier guide qui s’offrait à nous, c’était la Gazette, et nous avons cru devoir descendre avec elle jusqu’à la révolution. À cette époque, une nouvelle ère s’ouvre pour le journalisme, et l’intérêt puissant qui s’y attache mérite que nous en fassions l’objet d’une étude particulière. Mais jusque là même la Gazette n’avait point été l’unique expression du journalisme ; d’autres essais avaient été tentés avec plus ou moins de succès, et nous ne pourrions, sans être incomplet, les passer sous silence. Tout, d’ailleurs, intéresse dans ces premières tentatives d’une puissance qui s’ignore elle-même et s’essaye timidement à la vie.