Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/33

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De sages gens prenaient la peine
De lui fournir chaque semaine,

et qu’il rimait, après en avoir séparé

Le civil d’avec le barbare.

« La manière de poésie de notre auteur, dit un contemporain, est toute naturelle et sans affectation aucune ; il ne cherche point de mots ampoulés pour étonner les oreilles ; il ne fait point de digressions inutiles, et suit son sujet agréablement et naïvement. » Cette simplicité est quelquefois poussée jusqu’à la négligence. Mais il faut dire aussi que Loret obéissait à un autre démon que le démon de la poésie, à la dure nécessité, et il eût été difficile que sa verve ne s’en ressentît point quelquefois. Comme il le dit lui-même,

Il lui fallait plus d’une fois
Se mordre bien serré les doigts…
Pour satisfaire à son devoir.

« ll n’y avait point à se résoudre et à s’aviser ; ayant commencé ce travail, il fallait s’y occuper sans aucun relâche ; on demandait cela de lui, on l’en priait, et en un besoin on l’y aurait doucement forcé. On attendait de lui un divertissement qui ne manquât point, qui fût toujours nouveau, et il lui fallait une merveilleuse invention d’esprit pour accommoder les choses, et leur donner toujours une nouvelle face. »

À ce métier

Sa plume eût été vite usée,
Et sa pauvre veine épuisée ;
Ne sachant ni latin ni grec,
Il eut été bientôt à sec,
Sans quelque assistance céleste…
Sans un ange qui l’inspirait,