Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/9

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nue ; mais on ne dit pas que Renaudot ait abusé ou même usé de cette clause rigoureuse. Que l’on compare ces conditions à celles que font nos monts-de-piété actuels ! Cependant, les bonnes gens ne manquèrent pas de crier à l’usure. Mais Renaudot leur préparait de bien autres sujets de criailleries.

À cette époque on manquait absolument de moyens de publicité ; il n’y avait pas plus de publicité commerciale que de publicité politique. Ce n’était que par ouï-dire que l’on connaissait les événements, et ce que l’on voulait faire savoir au public, on n’avait d’autre ressource que de le faire crier par les rues. Pour avoir une idée de ce que devaient être alors les relations sociales, qu’on se figure, si l’on peut, ce qui adviendrait si les journaux et les affiches venaient tout à coup à être supprimés. Ce fut Renaudot qui porta la lumière dans ce chaos.

Il établit d’abord, sous le titre de bureau d’adresses ou de rencontre, une sorte d’office de publicité, ou chacun pouvait se procurer l’adresse dont il avait besoin, ou tel autre renseignement de même nature. Là se rencontraient les acheteurs et les vendeurs, et l’on y tenait registre de ce dont ceux-ci voulaient se défaire, et de ce que ceux-là désiraient acquérir. Les nouvellistes aussi s’y donnaient rendez-vous et y tenaient de paisibles conciliabules. Tout élémentaire qu’était cette institution, l’utilité en fut universellement appréciée, et les bureaux d’adresses se multiplièrent rapidement sous la direction de leur fondateur, qui en fut nommé Maître général.

C’était comme un acheminement vers la publicité par la presse, et Renaudot ne tarda pas à arriver à cette nouvelle conception, qui devait mettre le sceau à sa renommée. Il était on ne peut mieux placé pour être renseigné sur toute espèce de choses : il savait,