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« Soyez doux. Comprenez. Admettez. Souriez »,

et même protestant, par sa prédication du culte intérieur, ou suave et compatissant comme François d’Assise. Bref, il s’occupait trop d’amour.

M. Rostand interviewé déclara : « Je m’appliquai à me mettre dans l’état de passion de cette femme qui, étant allée en chantant puiser une cruche d’eau pure au puits de Jacob, rentrait à la ville éperdue, affolée de communiquer au peuple la foi que lui avaient donnée la connaissance et la parole du Christ. N’est-ce pas le plus extraordinaire des drames de conscience ? Imaginez-vous Liane de Pougy allant au Bois, rencontrant le Christ et revenant à Paris subitement, n’ayant plus qu’un désir, qu’une folie, évangéliser ses compatriotes ! »

C’est la méthode de l’artiste ; et c’est, possible, la seule bonne, quand il faut créer des personnages qui vivent.

On ne peut nier que la Samaritaine, au théâtre, émeuve, et d’une émotion religieuse, et que le poète y intervienne de façon moins apparente qu’ailleurs. Construit avec ses trois tableaux, comme un triptyque, cet « Évangile », où il y a, sans parler du lyrisme, de l’onction et de la vie, utilise habilement le Livre Sacré, décrit une harmonieuse courbe, scéniquement traduite, vers l’humiliation, l’enthousiasme et l’agenouillement final. La foule s’y agite pittoresquement ; les principaux disciples y ont leur caractère, Jean tendre, Pierre grincheux ; la Photine du sixième amant y apporte un accent du Cantique des Cantiques,