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Le théâtre, ainsi compris, a-t-il fait tort au poète ? Il ne semble pas, même s’il a dominé son esprit, car Edmond Rostand est essentiellement un poète lyrique, et son lyrisme n’a fait qu’augmenter et étendre la portée et l’efficacité de son merveilleux sens théâtral. Sans parler des Musardises, ce lyrisme s’étale dans le théâtre et sous bien des formes. La quantité de strophes lyriques, jetées çà et là, de couplets, de morceaux, de pièces à forme fixe, est telle qu’on en pourrait constituer une Anthologie. Le lyrisme, s’il se manifeste plus particulièrement, si l’on veut, dans la conception et le cadre de la Princesse lointaine, dans le 3e acte de Cyrano ou le deuxième de Chantecler, il est dans la tendance à l’allégorie et au symbole, fort limpides, qui exista de bonne heure chez le poète, et dans la virtuosité verbale du satiriste ou du comique. Celui qui décrit son décor avec richesse, qui choisit pour ses chœurs de Cigales ou d’Abeilles des mots d’une sonorité choisie, qui anime une forêt, — qui intervient sans cesse avec sa baguette de magicien, c’est un poète lyrique.

Mais, voilà, M. Rostand est, au fond, un lyrique gai, et ils sont quelques-uns qui n’admettent plus de tels poètes en France.


Le nôtre est original. Ce n’est pas un « faiseur ». Ainsi que les plus purs artistes — ainsi qu’un César Franck — il ne se répète pas, il brise le moule après chaque œuvre, et aucune de ses