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Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/183

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mait, des bruits ou des aspects de la rue, que ceux qui lui rappelaient son enfance. Le craquement des roues de charrette autour de leurs essieux criards, la fanfare du marchand de marée, les débats bruyants renouvelés à chaque porte entre les ménagères bavardes et le maraîcher qui leur vendait ses légumes, le tin-tin dissonnant de la brouette du boulanger caressaient agréablement ses oreilles. Certain jour, dans l’après-midi, un rémouleur vint établir sa meule sous l’Orme Pyncheon, et justement en face de la Croisée en ogive. De toutes parts accouraient les enfants, l’un avec les ciseaux maternels, l’autre avec les rasoirs du papa, et la roue magique allait son train, mue par le pied du rémouleur, opposant la dureté de la pierre à la dureté de l’acier. De leur contact jaillissait un sifflement odieux, pareil, quoique plus restreint, à ceux dont Satan et ses pairs emplissent le Pandœmonium. C’était un affreux petit bruit, véritable serpent de l’acoustique, et une des pires violences faites à l’oreille humaine. Clifford, cependant, l’écoutait avec un plaisir sans mélange. Quelque désagréable qu’il fût, ce son impliquait l’idée du mouvement et de la vie, et dans le cercle d’enfants curieux qui suivaient de l’œil les rapides évolutions de la meule, il retrouvait, plus vivement qu’ailleurs, l’image de l’oisiveté heureuse, du plaisir facile, de l’excitation à peu de frais. Néanmoins, c’était au passé qu’il fallait demander le secret de ce goût fantasque : — tout enfant, il avait entendu geindre et grincer l’appareil du gagne-petit.

Ce charme des vieux souvenirs manquait impunément à tout ce qui se recommandait par une beauté quelconque, si humble qu’elle fût d’ailleurs. On put