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Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/59

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condes, il considéra la marchande, ainsi que l’eût pu faire un client beaucoup plus âgé, ne sachant guère comment il fallait interpréter son attitude tragique et l’étrange dédain qu’elle semblait mettre à le toiser du haut en bas.

« Hé bien ! mon enfant, que voulez vous ? demanda-t-elle, reprenant courage devant un personnage si peu formidable.

— Ce bonhomme, là, sur la fenêtre, répondit le marmot tirant un cent de sa poche, et désignant du doigt la figure de pain d’épice qui l’avait séduit… Je veux dire celui qui n’a pas le pied cassé. »

Hepzibah, là-dessus, étendit son bras maigre, et prenant le « bonhomme » sur l’étalage, le remit solennellement à sa première pratique.

« Gardez l’argent ! » lui dit elle, en le poussant légèrement du côté de la porte, car sa noblesse bien enracinée se révoltait à l’aspect de la monnaie de cuivre, et il lui semblait misérable d’accepter, en échange d’un morceau de vieux pain d’épice, les précieuses économies d’un pauvre petit enfant… « Gardez votre cent ! Je vous fais cadeau du bonhomme ! »

L’enfant — à qui cet exemple de libéralité tout à fait inouï pour lui, malgré sa fréquentation des boutiques à deux sous, avait fait ouvrir de grands yeux tout ronds, — s’empara du pain d’épice, et se hâta de quitter le magasin. À peine sur le trottoir, (le petit cannibale !) la tête du « bonhomme » était déjà dans sa bouche. Comme il n’avait pas pris soin de tirer la porte après lui, Hepzibah dut se résoudre à l’aller fermer, avec une ou deux exclamations contrariées sur le dérangement occasionné par les enfants en général, et