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Page:Hazard – Discours sur la langue française, 1913.djvu/31

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lisation. Il ne s’agit plus de conquérir une classe privilégiée, mais bien de parler à tous ceux qui pensent. Plus impérieuse devient notre curiosité, et plus nécessaire une langue qui la satisfasse. Plus nous avons conscience d’une mêlée qui serait inextricable sans un signe de ralliement, et plus nécessaire une langue qui apporte un principe d’ordre. Plus d’idées entrent en circulation, les unes vagues, bizarres, dangereuses, indignes de vivre ; les autres précises, saines, salutaires, et dignes de demeurer : et plus nécessaire une langue capable de choisir, d’éliminer ou de conserver. Plus nous nous sentons liés à tous nos frères les hommes, et plus nécessaire une langue qui nous maintienne unis. C’est de cette nécessité même que profite le français : ce que l’avènement des nationalités a pu lui faire perdre, il le regagne, et au delà, par le besoin toujours croissant de communications internationales.

Car on ne saurait prendre une autre langue. Elle doit continuer à servir parce qu’elle a servi ; elle a pour elle la force du mouvement commencé. Si, par un accord impossible, on décidait de l’abandonner, autant vaudrait