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introduction.

faire et leur talent d’exécution. Par là, le spectateur est parfaitement débarrassé du fond essentiel de la représentation elle-même. L’œuvre d’art le met uniquement en tête-à-tête avec l’artiste, puisque ce dont il s’agit avant tout, c’est que chacun voie ce que celui-ci a voulu faire, avec quel esprit et quelle habileté il l’a saisi et exécuté. Or, être mis ainsi en communauté de vues et de jugement avec l’artiste, c’est ce qui flatte le plus. Le lecteur, l’auditeur ou le spectateur admire le poète et le musicien, le peintre, le sculpteur ou l’architecte, d’autant plus facilement qu’il trouve sa propre vanité plus agréablement satisfaite, que l’œuvre d’art l’invite davantage à s’asseoir à ce tribunal intérieur, et lui met, comme dans la main, les intentions et les vues de l’artiste. Le style sévère, au contraire, n’accorde presque rien au spectateur. Par sa grandeur seule et par la manière simple dont il est exprimé, le sujet lui-même repousse sévèrement et durement tout ce qui ressemble à la personnalité. Cela peut être aussi l’effet d’une simple hypocondrie de l’artiste, qui, après avoir mis dans son œuvre une idée profonde, ne veut pas procéder à une exposition libre, facile et sereine ; il rend à dessein difficile au spectateur l’explication de sa pensée. Mais le mystérieux qui s’étale, à son tour, est également une affectation et offre un faux contraste avec le gracieux dont il a été parlé plus haut.

Les Français, principalement, travaillent dans ce genre qui flatte le spectateur, qui est agréable et pro-