qu’ils sont malheureux ; c’est qu’ils poursuivent dans les talents l’offense que le mérite fait à leur vanité : leurs crimes ne sont que des vengeances.
Un autre motif de l’indulgence de l’homme de mérite tient à la connoissance qu’il a de l’esprit humain. Il en a tant de fois éprouvé la foiblesse ; au milieu des applaudissements d’un aréopage il a tant de fois été tenté, comme Phocion, de se retourner vers son ami pour lui demander s’il n’a pas dit une grande sottise, que, toujours en garde contre sa vanité, il excuse volontiers dans les autres des erreurs dans lesquelles il est quelquefois tombé lui-même. Il sent que c’est à la multitude des sots qu’on doit la création du mot homme d’esprit ; et qu’en reconnoissance il doit donc écouter sans aigreur les injures que lui prodiguent des gens médiocres.