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DE L’HOMME,

sible d’être à-la-fois toujours juste et puissant. On fait sans doute de son pouvoir un usage meilleur ou moins bon, selon l’éducation différente qu’on a reçue ; mais enfin, quelque heureuse qu’elle ait été, il n’est point de grand qui ne commette encore des injustices. L’abus du pouvoir est lié au pouvoir comme l’effet l’est à la cause. Corneille l’a dit :

Qui peut tout ce qu’il veut veut plus que ce qu’il doit (32).

Ce vers est un axiome moral confirmé par l’expérience ; et cependant personne ne refuse une grande place dans la crainte de s’exposer à la tentation prochaine d’une injustice : l’amour de l’équité est donc toujours en nous subordonné à l’amour du pouvoir ; l’homme, uniquement occupé de lui-même, ne cherche que son bonheur. S’il respecte l’équité, c’est le besoin qui l’y nécessite (33).