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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

Cette relative complicité lui semblait normale, mais une chose l’étonnait dans sa nouvelle vie. C’était l’aisance avec laquelle elle s’y était faite, quand elle aurait cru en souffrir. Deux mois plus tôt, la perspective de sortir un soir aurait suffi à l’assombrir plusieurs jours d’avance et maintenant qu’elle recevait des invitations à la cadence de deux ou trois dans la même semaine elle ne songeait pas à s’en plaindre. Marc, il est vrai, de contentement, trépignait à toutes et, redoutant qu’elle ne donnât des signes de fatigue, usait près d’elle de mines gracieuses et de cajoleries pour qu’aucune ne fût écartée. D’un bal, elle rentra toute vibrante. Comme elle buvait, servie par Marc, un verre d’orangeade, elle avait, derrière elle, entendu deux dames. Leurs voix portaient un peu plus loin qu’elles n’auraient pensé et, soudain, l’une avait glissé dans l’oreille de l’autre : « Vous dites sa belle-mère ? Allons donc ! On la prendrait plus volontiers pour sa sœur aînée ! » Ce propos la troubla de sérieuse manière. Elle en fit part à son beau-fils, ils en rirent tous deux, mais désormais, dans les salons, quand régnaient les danses, elle l’eut constamment à l’esprit. C’était pour elle moins un sujet de méditation que comme une caresse intérieure. Elle s’en délectait avidement. Expérience qu’autrefois elle eût méprisée, elle essaya de déchiffrer dans les yeux des hommes l’impression produite par son âge. En même temps, l’atmosphère de plaisir facile qui, jusqu’alors, l’avait laissée sans grande émotion, la baignant mieux, lui parut douce, excita son cœur, commença