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Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/179

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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

désemparé, devenu sa proie, ne vivait plus que pour offrir à des chairs sans nom un rafraîchissement perpétuel. À chaque tableau qu’elle se faisait de cette basse débauche, Hélène mêlait son personnage comme celui d’une folle de qui les plaintes et les blasphèmes réjouissaient l’amante sans toucher les entrailles de sa jeune victime. En vain ses cris suppliaient-ils et maudissaient-ils, le couple affreux tournait vers elle des regards cyniques et n’en perdait pas une caresse. Sa poitrine éclatait sous l’indignation, le désespoir de l’impuissance lui tordait les membres, et tout à coup soufflait en elle une horreur plus vive qui la raidissait dans les draps. Un instant, ses yeux secs déchiraient la nuit. Puis, ses pensées prenaient un cours moins extravagant et elle se mettait à pleurer.

Lorsqu’au matin elle revit Marc et qu’il l’embrassa, elle était épuisée, mais beaucoup plus calme. Déjà, le sens de son devoir, maîtrisant ses nerfs, rendait à son cœur l’énergie. Mieux à même de juger la situation, elle reconnut avec sagesse et qu’elle était grave, et, en même temps, que sa douleur l’avait amplifiée. La folie d’un jeune homme, n’est-ce pas chose courante ? Cela vaut-il qu’on s’en émeuve comme d’une catastrophe ? Dans le domaine pathologique, s’effraie-t-on d’un rhume, va-t-on trembler ridiculement pour une simple grippe que quelques soins élémentaires suffisent à combattre ? Puisque Marc n’avait pas cette délicatesse grâce à laquelle certaines natures prennent