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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

petite parente. Elle avait, sans doute, peur de la contagion. Merci bien ! lança-t-elle d’un air dégagé en se dirigeant vers la porte.

Comme aspiré de sa poitrine par une bouche violente, tout le bonheur qu’elle éprouvait une minute plus tôt s’était subitement évanoui. Elle se reprit, courut d’une traite jusqu’au Bon Marché, fit alors demi-tour et rentra chez elle. Cheminer plus avant l’aurait excédée. Son sentiment était celui d’une personne avare qui, séparée de son trésor, soudain cesse de vivre à la pensée qu’un besogneux dont elle se méfie aura pu profiter de son éloignement. La courte absence qu’elle avait faite lui semblait une faute. Plus elle allait vers sa maison, plus son cœur battait, plus elle marquait le pas sans grâce d’une femme agitée. Par une rencontre, il faut l’avouer, plutôt singulière et qui la troubla fortement, elle croisa sous la voûte un télégraphiste et la concierge, à son passage, un instant après, lui remit une dépêche à l’adresse de Marc. « C’était à prévoir ! » se dit-elle. Dans l’escalier, elle avait chaud et soufflait un peu, mais s’estimait récompensée d’avoir marché vite. Que, résistant par nonchalance ou par raisonnement à l’étrange impulsion qu’elle venait d’avoir, elle se fût attardée cinq minutes de plus, le télégramme était monté à l’appartement où Marc, debout, le recevait et le décachetait. Nul sourire emprunté ne l’aurait trahi, une distraction, un oubli quelconque encore moins, et les servantes n’étaient pas femmes qu’elle pût ques-