Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/63

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
61
LE SUPPLICE DE PHÈDRE

l’initier aux molles jouissances que procurent les sons, comme autrefois, après deux ans d’une lutte opiniâtre, elle lui avait, découragée, fait grâce du piano. Par ambition de conserver son empire sur lui, elle évitait rigoureusement de le contrarier sans nécessité véritable et imposait certaines limites à ses exigences. En même temps, elle tâchait à le captiver par le moyen de distractions pour elle assez froides, mais dont l’accueil que leur faisait une génération lui témoignait que sa jeunesse pouvait être avide. Rien que reniât l’intelligence ne la passionnait. Dans le sport, par exemple, elle voyait un jeu et n’appréciait guère qu’une hygiène. Qu’on pût placer son amour-propre à franchir une barre un pouce plus haut que tel Croate ou tel Scandinave, à courir plus vite que tel Grec, à projeter un bloc de fonte, une massue, un dard à telle distance, enregistrée jusqu’aux millimètres, que n’atteignait pas tel Hindou, lui paraissait d’un ridicule que dépassaient seuls les chroniqueurs qui célébraient de pareils exploits. Cependant, elle s’enquit des lieux consacrés au culte public des athlètes et, lorsqu’elle sut qu’avec l’hiver ils restaient chez eux, conduisit Marc au vélodrome où ce qu’elle goûta fut la débauche de l’enthousiasme aux places populaires. À dire vrai, le milieu la gênait plutôt. Ni les figures, ni les accents, ni les boustifailles n’offraient de quoi se concilier, dans l’odeur des pipes, cette républicaine convaincue à qui manquait pour être à l’aise dans ses opinions de supporter sans répugnance la vulgarité.