Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
78
LE SUPPLICE DE PHÈDRE

les reproches d’un parent y poussaient une fille. Soudain, passant du drame si proche à son auteur même et jugeant sa belle-mère pour la première fois, il détesta, non le seul rôle qu’elle avait tenu vis-à-vis d’Alice interdite, mais ses principes, ses prétentions, son intransigeance et son caractère tout entier. Que signifiait cet espionnage dont elle l’entourait ? Depuis quand un jeune homme sorti du lycée portait-il encore des lisières ? Désireux de goûter dans son amertume tout l’exceptionnel de son cas, il recherchait, parmi la foule de ses condisciples, quelque visage où se trahît manifestement une adolescence opprimée et ne voyait s’en détacher que de fiers garçons respirant la vigueur et l’indépendance. La plupart, sinon tous, avaient des maîtresses. Ils s’en flattaient, buvaient comme elles, se contaient leurs frasques et les escortaient sans vergogne. N’était-ce pas plus coupable, et surtout moins digne, que de flâner au Luxembourg, deux fois par semaine avec une jeune fille de son rang ? « Je m’affranchirai ! » pensa-t-il. Mais ce propos tintait en lui d’un accent plus vif que profondément convaincu. Il couvrait : « Espérons qu’elle m’affranchira ! »

Marc s’était jeté sur son lit. Ce trait seul dénotait son effervescence, car il savait comme, en plein jour, une pareille mollesse lui était restée défendue. Les yeux fixés sur la corniche qui courait au mur, à observait machinalement le progrès des ombres que le crépuscule y versait. La jolie pièce bien décorée lui semblait maussade, lui faisait l’effet d’une pri-