Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/96

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
94
LE SUPPLICE DE PHÈDRE

lourde et qu’elle ne pouvait surmonter. C’était comme si, voulant dormir après une fatigue, elle s’était vue à tout instant tirée du sommeil par une impression d’étouffement. L’idée que Marc ne l’aimait plus l’indignait parfois et, d’autres fois, la pénétrait de l’amère jouissance que goûte en face de la rancune une âme impérieuse, mais, plus souvent, jetait en elle une contrariété dont s’obscurcissait toute sa vie. Bientôt, la gêne qu’elle éprouvait fut insupportable. Le chagrin apparut pour la compliquer. Dans sa conscience, l’hostilité qu’elle s’était acquise prit les proportions d’un malheur.

Elle rendit à Marc sa pension. Pour ses retours, elle composa, se montra moins stricte et cessa notamment de l’importuner par des surprises qui l’humiliaient, comme passées d’époque. Mais on eût dit de ces largesses qu’elles lui étaient dues, qu’il ne faisait que recueillir petitement en elles les effets d’un remords sans aucun mérite, tant elles semblèrent peu l’émouvoir. Cette attitude, dont aurait pu se vexer Hélène qu’elle payait mal de son effort vers le renoncement, au contraire, l’excita par son imprévu, la stimula dans son désir de rentrer en grâce, car elle y sentait celle d’un homme. Après quelques faveurs, quelque indulgence, devant des mines et des transports d’enfant pardonné, tout son esprit d’autorité l’aurait ressaisie. Négligée, elle comprit qu’elle faisait trop peu. Par induction, la peur lui vint que de longues racines eussent déjà fortifié dans le cœur de Marc le ressentiment qu’il lui vouait et, sur une crise de désespoir qui dura des