Aller au contenu

Page:Henri IV - Lettres Missives - Tome6.djvu/658

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
GZ12
LETTRES MISSIVES


Peut—estre estiment-ils, par telles demonstrations genéreuses et deter- minées, intimider le Pape et le disposer faire resoudre plus tost à re- voquer ce qu’il a faict contre eux, par la consideration de sa foi— blesse et celle de leur puissance ; mais j’estime le chemin si perilleux et hazardeux, que je n’approuve aucunement qu’il soit suivy, car il faut qu’ils croient que le Pape peut, en tel cas, se roidir et opiniastrer aussy bien que eux, et qu’il n’y aura laulte d’instigateurs et boutans-feux qui ' le pousseront à pis faire. Ce seront peut-estre ceux-là mesmes qui s’oH’riront les premiers aux dicts Venitiens à faire le contraire ; allin de prolliter de leur dillerend, et de leur mutuel alloiblissement, comme de la necessite en laquelle les deux parties se trouveront reduictes par la continuation de la guerre. Pour moy, je pretends jouer tout autre personnage ; car je ne cesseray d’admonester, prier et presser l’une et l’autre partie de s’accorder doulcement et amiablement, tant qu’il me restera quelque espoir d’y pouvoir estre utile. Puis, e me conseil- leray avec Dieu et les evenemens de ce que j’auray à laire, voulant conserver ceste mienne liberté, non pour abuser l’une et l’autre par- tie par promesses et esperances pleines de duplicité et fallace, comme d’autres, mais pour leur pouvoir estre plus utile, et au public, qui est le seul but auquel e vise. Ces dicts Seigneurs doibvent considerer ` que je suis seul entre tous les princes chrestiens qui, jusques à pre- sent, a continué àvivre avec eux, tant par mes ambassadeurs que en- vers ceux de la Republique, comme je faisois devant la publication de la bulle du Pape, car l’Empereur, le roy d’Espagne et les autres y ont apporté du changement. Par ou ils peuvent cognoistre quelle est la fermeté et la solidité de mon amitié envers leur Republique, à com- paraison des autres, et par consequent ce qu’elle s’en peut justement promettre à l’advenir. A quoy elle ne sera deceue, principalement si elle veult avoir soing de justifier sa procedure et conduicte en ceste occasion, sans rejecterles bons et salutaires conseils qui luy sont don- nez, lesquels aussy je regleray et mesureray tousjotus à l’esgard que je doibs avoir à la vraie et essentielle conservation de Yauctorité de leur Republique, comme j’ay eu jusques à present. Doncques, comme