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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

comme ce pauvre Privat d’Anglemont, essayant de tuer par la marche un sommeil qu’ils ne peuvent trouver dans leurs greniers ouverts.

Peut-être ont-ils raison : la vie est une arène ouverte au vent et à la poussière, où il vaut mieux être spectateur que combattant.

J’étais resté seul sur l’impériale, et l’orage ruisselait sur ma tête ; de temps à autre j’essuyais mon front trop mouillé et contemplais le but de ma course avec une certaine allégresse. Un être, mi-paysan, mi-ouvrier, venait d’attacher à notre char un troisième cheval, et nous gravissions avec lenteur l’effrayante montée des Martyrs. Comme Hippolyte, le cocher,


…Sur ses coursiers laissait flotter les rênes.

L’être dont j’ai parlé, et qui accompagnait la voiture, ne tarda pas à apostropher son camarade, et il s’engagea entre eux une conversation que le bruit de la pluie et des roues ne me permettait d’entendre qu’imparfaitement, mais que je rapporterai cependant dans sa patriarcale et naïve simplicité.

« Quoi qu’tu dis aujourd’hui ? cria l’être d’une voix enrouée, lorsqu’il eut fait une dizaine de pas auprès de son cheval.

— J’t’entends pas, dit le cocher.

— Je dis quoi qu’tu dis donc aujourd’hui ? reprit l’être toujours souriant.

— J’cause pas avec toi, t’es trop gamin.