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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

Pour expliquer toutes les folies humaines, les philosophes vous disent :

L’homme est né orgueilleux.

L’homme est né luxurieux.

L’homme est né menteur.

L’homme est né faible.

L’homme est né sot.

L’homme est né… que sais-je encore ?

Soyez-en sûrs, mes excellents lecteurs, l’homme, avant tout, est né gourmand.

Il ne vit que pour manger, et, pour vous le prouver, prenons un exemple dans l’existence des trois quarts des humains dits raisonnables.

Les trois quarts, ne mettons que les deux tiers si cela peut vous être agréable, travaillent soit à une chose, soit à une autre, mais toujours à un métier qui les ennuie. Les sept huitièmes de ces deux tiers y consacrent leur journée entière ; il ne leur reste donc pour jouir de la vie que l’espace de temps destiné à leurs repas et à leur sommeil. Or, si le sommeil n’est pas la vie, il faut bien qu’ils vivent pour manger, ou… pourquoi vivent-ils ?

Remarquez combien je suis bon joueur. Je ne fais point entrer en ligne de compte, dans cette courte énumération, l’énorme multitude d’esclaves, de peuples opprimés, de femmes emprisonnées, qui parsèment la surface du globe, et je passe sous silence tous les malheureux des siècles écoulés.

De cette gourmandise qui lui semblerait au premier abord inutile, est né, pour le dernier quart des humains, ce besoin factice dont la satisfaction s’appelle le luxe. Le désir du luxe est la gourmandise des grands. Leur table, pour être mieux servie que celle du pauvre, reçoit-elle un homme plus heu-