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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

reux ? Non, sans doute, faibles et puissants ont les mêmes jouissances, les seules pour lesquelles ils supportent la vie, et que, faute d’en trouver un meilleur, il faut bien désigner par ce mot, gourmandise.

Ceci étant avéré, tout homme au cœur plus haut placé que l’estomac ne doit pas s’inquiéter de vivre, par conséquent, il s’emportera contre l’humanité détériorant, dans l’unique but de se procurer une plus abondante subsistance, la beauté terrestre, cette image de la splendeur divine, qui, dans les premiers âges, fut peut-être une compensation de l’absence de l’Éternel.

« Paré à virer !

— Mordieu ! m’écriai-je, ne débarquerons-nous point ?

— Paresseux, serais-tu déjà fatigué ?

— Non, mais je ne tiens nullement à achever un voyage nocturne. Que dirait mon lecteur si je m’amusais à lui raconter les effets de la lune sur les grands arbres ? Il serait en droit de me comparer à ce peintre, à qui l’on demandait un tableau intitulé le Passage de la mer Rouge, et qui traça une large ligne noire sur la toile qu’on lui présentait. Tu connais l’histoire. Où sont les Hébreux ? Ils sont passés. Où sont les Égyptiens ? ils vont venir. »

Un seul mot avait frappé mon ami Fritz, celui de lecteur.

« Je comprends tout, s’écria-t-il, tu veux faire un livre ?

— Pardieu ! serais-tu comme Boutin ? Devinerais-tu les calembours un quart d’heure après leur explosion ?

— Eh bien ! nous aborderons à Bercy.

— À Bercy, soit.

Paré à virer ! »