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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

cloches, c’est que je demande à quel saint elles appartiennent. L’Église jugera-t-elle à propos de me canoniser ? je l’ignore. La seule grâce que je réclame de Dieu est de vivre le plus longtemps possible sans faire de miracles.

— Pourquoi ?

— Cela coûte trop cher.

— En attendant, sois heureux : les cloches viennent de Saint-Séverin. »

Conversation longue et intéressante sur les neuvaines. Il résulte de cet entretien :

1° Que chaque année, à diverses époques, l’Église réunit ses fidèles pendant neuf jours, à l’effet de prier pour l’envoi de la pluie s’il a fait beau depuis quelque temps, ou pour l’avènement du soleil, si la pluie n’a cessé de tomber depuis une quinzaine. Si le ciel est pur, l’homme réclame les nuages : si la tempête éclate, un rayon d’azur. Fritz prétend que le croyant ignore lui-même ce qu’il demande, et que Dieu doit être fort embarrassé.

Je vous signale, en passant, mon ami Fritz comme un sceptique affreux. Croiriez-vous que le misérable poussa l’audace jusqu’à accuser le ciel de ne tenir aucun compte des prières de sa tante, une vénérable demoiselle dont la tête a subi cinquante fois la neige des hivers et la rosée des printemps. Certes, c’est une vertu devant le Seigneur, vertu qui n’a jamais chancelé, soit par suite de sa solidité naturelle, soit qu’en vérité ses pas n’aient point rencontré de trous ; c’est une de ces pieuses acolytes que tous les temples se disputent ; eh bien ! Fritz ne craint pas d’affirmer que le curé de sa paroisse a dû bannir son ouaille de toute participation