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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

ma situation est toujours pour eux la source d’un étonnement profond et cent fois renouvelé.

Ce jour-là, il y avait donc grande querelle et j’y courus, non pour voir cette fois, mais pour séparer. J’arrivai trop tard.

C’était une grande sœur de douze ans qui s’efforçait d’arracher une toupie à un petit frère, de quatre ans moins âgé. Elle mettait à cet acte d’autorité l’entêtement et la gravité d’une véritable maîtresse d’école. Naturellement, la résistance du petit frère était mêlée de sanglots et de larmes. Comme Antée, dès qu’il touchait la terre, il semblait reprendre de nouvelles forces, et continuait la lutte acharnée. La petite fille prit le parti d’Hercule. Quand je parvins à la voir, elle emportait l’enfant auprès de sa mère, le tenant ainsi, autant que possible, séparé de la terre ferme.

Qu’arriva-t-il ? vous ne sauriez le prévoir ; l’événement devait différer selon le caractère maternel, Il y a des mères qui auraient battu la fille, des mères qui auraient battu le fils, des mères qui n’auraient battu personne et consolé tout le monde.

Cette mère-là battit son fils.

Mais comme le petit garçon, tout pleurant, se servait de ses mains pour parer les coups, la méchante petite sœur eut la cruauté de lui tenir froidement les bras, pendant le temps de la correction.

Je ne veux pas savoir qui avait tort ou raison, mais je trouvai cet acte abominable. J’affirme qu’un petit garçon n’eût jamais commis pareille noirceur.

Est-ce à dire que les petits garçons valent mieux que les petites filles ?