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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

vient de pénétrer au cœur de l’Australie ; on jette des voies ferrées dans la Chine. En un mot, tout a été découvert, — tout, excepté Paris.

Je ne m’étonnerais pas qu’il y eût des gens capables de nier l’existence de cette capitale, assurant qu’elle est le fruit mythologique de l’imagination éperdue de nos romanciers. Vainement j’ai parcouru nos bibliothèques, dans l’espoir d’y rencontrer quelque narration de voyage dans la première des cités ; des myriades de volumes m’ont passé dans les mains et sous les yeux ; eussé-je voulu étudier le Spitzberg, le Groënland ou l’île de Feu, je n’aurais eu que l’embarras du choix. Pas un arbre de ces contrées trans-océaniques, pas une cabane de sauvage, pas un oiseau-mouche n’ont été oubliés dans la nomenclature.

Sur Paris, rien.

Les tableaux, les études de mœurs, les statistiques, les livres de toute sorte et de toute forme, ne présentent nullement les caractères de l’exploration. On a observé Paris dans ses spécialités, on ignore son coup d’œil général ; on l’a habité, on n’y a pas voyagé.

L’insuffisance de tous les ouvrages me fournit une idée toute naturelle ; je conçus un vaste projet.

« Ce que personne n’a osé entreprendre, je l’exécuterai, moi, m’écriai-je du ton sérieux que doit mettre l’actrice à prononcer le mot illustre de Médée ; l’univers attend un livre, je lui donnerai ce livre.

« Je découvrirai Paris. »

À peine cette résolution fut-elle prise, que je fis mes préparatifs de voyage.