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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

— Je l’ignorais, » dit Fritz.

Fritz, si mon lecteur a bien voulu s’informer de son caractère, a dû lui être dépeint comme un homme parfaitement insouciant, et ne s’attachant pas plus à ses idées qu’aux différents événements de son existence. Il se contenta donc de me demander si ma résolution de terminer là mon voyage était définitive ; et, sur un oui formel, il alla rendre les derniers devoirs à son canot.

Le mystère le plus profond environne ce moment de son existence. Cinq minutes, je restai seul.

Ces cinq minutes furent délicieusement employées.

Les ténèbres s’épaississaient ; un croissant de la lune laissait seulement briller sa lueur pâle sur le toit plat d’une délicieuse maison, environnée de lierre et de feuillage.

Une lumière scintilla ; une fenêtre s’ouvrit.

Au travers de la verdure, j’aperçus une jeune femme qui pencha la tête comme une levrette nonchalante, et aspira l’air frais du soir.

Puis elle se retourna en riant, et je vis, dans le cercle tremblotant projeté par la bougie, un baby blanc et rose, qui tirait à lui, de toutes ses faibles forces, la robe de sa grande sœur… ou de sa mère.

Celle-ci arracha une branche de lierre, approcha un siège, prit l’enfant sur ses genoux, et entrelaça sur ses cheveux blonds une couronne de roses blanches.

Son visage, éclairé de profil, reflétait la pureté d’une vierge.

Mais son sourire aimant disait peut-être : Je suis mère.