un côté grotesque, ces excellents gardes nationaux, celui qu’aura toujours le bourgeois endossant l’habit militaire, et traînant pesamment son ventre et sa santé sous le harnais des camps et de la guerre ; mais il y avait dans leur réunion quelque chose de sublime, comme un germe de fraternité humaine dont la pensée arrêtait le rire sur les lèvres et faisait espérer. Cette association n’était-elle pas le symbole de ces temps éloignés où, les guerres finies, les armées disparues, les citoyens se garderont eux-mêmes, ou mieux, n’auront plus besoin d’être gardés ? Envisagée sous ce point de rue, l’institution était belle, et il n’y avait guère que les vrais soldats qui la blâmaient.
Pour avoir raison d’exister, les soldats ont besoin des gredins à l’intérieur, des ennemis à l’étranger.
Or, les uns et les autres n’étant que trop nombreux, la garde nationale, insuffisante, dut céder le pas aux guerriers, et ce recul fut son arrêt de mort.
Aujourd’hui il ne reste, et c’est une des singularités de ce singulier Paris, il ne reste que deux parts de ce corps respectable : les officiers d’état-major et les tambours.
Les officiers n’ont point de soldats, c’est vrai, mais ils n’en touchent pas moins leur traitement d’officiers.
Quant aux tambours, à quoi peuvent-ils être utiles, puisqu’ils ne sont jamais exposés à conduire des bataillons invisibles ?
Je vais vous le dire, et vous admirerez avec moi l’habileté administrative, prompte à utiliser même les branches mortes de ses arbres pourris.
Les tambours, au contraire du reste des gardes nationaux, sont tous de vieux militaires dont cet emploi est la retraite. Quelques-uns même portent des médailles dont j’ignore l’origine, car ma vue se perd parmi le nombre de celles