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dialecte.

historien qui avait écrit en un ionien différent de celui d’Hérodote ; ionien plus pur, suivant Hermogène ; et pourtant les grammairiens se sont généralement accordés pour regarder Hérodote comme la règle de l’ionien. Je pense qu’en cela ils ont eu tort, et qu’alors un des dialectes du dialecte ionien n’était pas plus la règle des autres, que l’attique ou le dorien n’était la règle du reste de la langue grecque.

J’ai montré que l’ionien d’Hippocrate diffère notablement de celui d’Hérodote et par conséquent de celui d’Hécatée de Milet. Photius[1] a remarqué que Ctésias ne se sert pas en tout du dialecte ionien, comme Hérodote, mais seulement dans quelques mots ; et qu’il ionise plus dans ses livres sur l’Inde que dans ses livres sur la Perse. Je suis très porté à croire, d’après cette observation, que l’ionien de Ctésias ressemblait beaucoup à celui d’Hippocrate.

Voilà donc, de compte fait, trois ioniens différents, celui d’Hécatée de Milet, celui d’Hérodote, et celui d’Hippocrate. Hérodote nous apprend qu’il y en avait quatre. Je ne chercherai pas à conjecturer (car il n’y aurait en ceci que des conjectures à faire) auxquels des quatre dialectes ioniens répondent les trois ioniens différents d’Hécatée, d’Hérodote et d’Hippocrate. Je remarquerai seulement que, déjà dans l’antiquité, des critiques avaient été frappés des dissemblances entre l’ionien d’Hérodote et celui d’Hippocrate. En effet, Galien dit qu’Hippocrate emploie, jusqu’à un certain point, le dialecte attique, et il ajoute que, suivant d’autres, la langue dont il s’était servi était la vieille langue attique[2]. Je pense que ce vieil attique d’Hippocrate est un des quatre dialectes parlés dans l’Ionie.

Un des résultats les plus certains de l’étude de la Collection hippocratique, c’est que cette Collection n’est toute entière ni du même temps ni du même auteur. Or, cela étant indubitable, j’avais eu quelque peine à concevoir comment il se faisait que le dialecte

  1. Κέχρηται δὲ τῇ ἰωνικῆ διαλέκτῳ, εἰ καὶ μὴ δι’ὅλου, καθάπερ Ἡρόδοτος, ἀλλὰ κατ’ἐνίας τινὰς λέξεις. – Τὰ Ἰνδικὰ οἷς μᾶλλον ἰωνίζει. Bibl. p. 66, Éd. Hoesch.
  2. Tome v, p. 523, Éd. Basil.