Aller au contenu

Page:Hirsch - Un vieux bougre, 1908.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
55
UN VIEUX BOUGRE

ruban de velours à son cou. Désœuvrée, elle s’en fut voir, à la fenêtre ; puis, elle déclara :

— Michel n’va pas tarder, j’pense…

L’aïeul remua la tête, tout à ses souvenirs. Elle comprit qu’il attendrait patiemment son petit-fils. À court de politesses, elle entama la narration de sa vie, car elle ne savait rien mieux et se désintéressait du reste. Son histoire nulle dispersa, à force de persévérance, les visions de Gaspard. Lui qui était plein de jours et dont le mauvais droit avait souvent triomphé du bon droit d’autrui, il s’émerveillait du récit médiocre, parce que la conteuse avait la jeunesse.

Elle en arrivait, après de menus épisodes rappelés avec gaminerie et dont elle avait souffert, à dire son roman d’amour. Une pudeur délicate tempérait sa joie. Elle rêvait, une seconde, entre deux phrases. Le vieillard, d’un sourire, l’encourageait à poursuivre. Elle ne se plaignait point d’avoir perdu trop tôt ses illusions d’amante dans des essais conseillés par la misère, puisque Michel les lui avait rendues.

Sa voix dolente imprégnait les mots d’une