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Page:Histoire de l'Asie centrale.pdf/7

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iii
INTRODUCTION

Les dates font malheureusement presque touours défaut, mais l’auteur nous dévoile les causes des faits qu’il raconte, il nous donne sur le caractère des personnages, sur les mobiles qui les ont fait agir, des détails précieux et intéressants. Écrivant à Constantinople, à l’abri des poursuites de princes soupçonneux et cruels, il fait connaître des faits que l’on ne retrouvera dans le récit d’aucun autre auteur.

Malgré toutes mes recherches, il m’a été impossible de recueillir quelques renseignements biographiques sur Mir Abdoul Kerim. Il paraît avoir appartenu à une famille de Séyids de Boukhara ; dans les vers qu’il a intercalés dans son récit, il prend le surnom poëtique de Nedim[1] qui fait allusion, sans doute, à la position qu’il a occupée dans la clientèle de hauts personnages. Il nous apprend, en effet, qu’il était au service de Châh Mahmoud et qu’il accompagnait ce prince lorsqu’il se réfugia à Boukhara. Il fut le kiahia ou l’intendant d’Ala oud din, ambassadeur du khân de Boukhara à la cour de Russie, et enfin il fit partie, en qualité de secrétaire, de l’ambassade qui se rendit à Constantinople en l’année 1222 de l’Hégire (1807). L’auteur nous apprend en outre, qu’il fit deux fois, en traversant les provinces de l’Asie centrale, le voyage du Kachmir et du nord de l’Inde. Il est fort probable, car nous en sommes réduits aux conjectures, qu’Abdoul Kerim, marié à Constantinople, y passa le resté de ses jours et que sa mort eut lieu après l’année 1246 de l’Hégire (1830).

Le manuscrit dont j’ai fait imprimer le texte à Boulaq est uaiquë. Il est écrit en nestaliq et les caractères dénotent la main d’un copiste de Boukhâra. Je m’ai pas cru devoir faire au texte la moindre correction : si j’avais dû faire disparaître les fautes d’ortographe, de grammaire et de syntaxe qui se trouvent à chaque ligne, le texte original eût été complètement transformé. Je me bornerai seulement à signaler la construction plutôt turque que persane des phrases, l’emploi presque exclusif du verbe noumouden pour kerden (faire), her gah (chaque fois), pour eguer (si), enfin la suppression de la conjonction ou (vè), et son remplacement par l’izafèh, faute qui se remarque, du reste, dans un grand nombre de manuscrits renfermant des pièces de poésies et copiés à une époque récente.

Abdoul Kerim, outre les mots turcs introduits dans le persan depuis le XIIIe siècle, emploie fréquemment des expressions empruntées à la

  1. Confident, commensal, favori.