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des deux Indes
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dans l’ancien ou dans le Nouveau-Monde que ce tribut ſoit payé, ils comprennent que le nom ne change rien à la choſe, & que leur liberté ne ſeroit pas moins attaquée de cette manière que de celle qu’on a repouſſée avec ſuccès. Les colons voient clairement que le gouvernement veut les tromper ; & ils ne veulent pas l’être. Ces ſophiſmes politiques leur paroiſſent ce qu’ils ſont, le maſque de la tyrannie.

Les nations en général ſont plus faites pour ſentir que pour penſer. La plupart ne ſe ſont jamais avisées d’analyſer la nature du pouvoir qui les gouverne. Elles obéiſſent ſans réflexion, & parce qu’elles ont l’habitude d’obéir. L’origine & l’objet des premières aſſociations nationales leur étant inconnus, toute réſiſtance à leur volonté leur paroît un crime. C’eſt principalement dans les états où les principes de la légiſlation ſe confondent avec ceux de la religion, que cet aveuglement eſt ordinaire. L’habitude de croire favoriſe l’habitude de ſouffrir. L’homme ne renonce pas impunément à un ſeul objet. Il ſemble que la nature ſe venge de celui qui oſe ainſi la dégrader. Cette diſpoſition ſervile de l’âme