Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/210

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fie pas tellement à tous, qu’on leur laisse assez de liberté naturelle pour s’enfuir, pour refuser leur service, ou pour brasser, s’ils veulent, quelque entreprise contre leur maître. Aussi on les tient enfer­més en des prisons, et s’ils travaillent, ce n’est qu’en quelque lieu bien assuré, ou sous la chaîne, comme les forçats dans les galères, qui ne représentent peut-être pas mal cette sorte d’esclaves, que les anciens nommaient Ergastulos, et dont on se servait à divers ouvrages, comme il se pratique encore aujourd’hui aux villes d’Alger et de Tunis, en la côte de Barbarie. Et de vrai, notre langue met beaucoup de différence entre un serviteur, un valet, un serf et un esclave. J’eusse employé le mot de domesti­que, qui est d’une signification générale, si je n’eusse pensé que celui d’esclave expri­mait mieux la privation de liberté, qui est ici supposée.


III. L’obligation d’un esclave envers son maître, ne vient donc pas de cela sim­ple­ment qu’il lui a donné la vie, mais de ce qu’il ne le tient point lié, ni en prison ; car, toute obligation naît d’un pacte, et le pacte suppose qu’on se fie à une personne, comme il a été dit au neuvième article du second chapitre, où j’ai défini que le pacte était une promesse de celui auquel on se fie. Il y a donc, outre le bénéfice accordé, la fiance que le maître prend en celui à qui il laisse la liberté de sa personne ; de sorte que si l’esclave n’était attaché par l’obligation de ce tacite contrat,