Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/386

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obligent en vertu de l’alliance traitée avec ce patriarche, comme promulguée de Dieu en tant que le Dieu d’Abraham et qui ont eu leur force avant Moïse, à cause du traité précédent. Mais les autres obligent seulement en considération de la dernière alliance qui fut faite avec le peuple même, et comme données de Dieu en tant que roi, particu­liè­re­ment des Israélites. Du premier ordre sont tous les préceptes du Décalogue qui regardent les mœurs, comme sont celles-ci : honore ton père et ta mère ; tu ne tueras point ; tu ne paillarderas point ; tu ne déroberas point ; tu ne diras point faux témoi­gnage ; tu ne convoiteras point. Car elles sont lois naturelles. Comme aussi le com­man­de­ment, de ne prendre point le nom de Dieu en vain, qui est une partie du culte naturel, ainsi qu’il a été démontré au chapitre précédent, art. XV. Pareillement le second précepte de loi, qui défend d’adorer Dieu sous quelque image que les hommes en aient inventée ; parce que cela aussi touche le service religieux enseigné de la nature, comme il est déclaré dans le même article. Du second rang est le premier commandement du Décalogue : tu n’auras point d’autres dieux devant moi ; car, en cela consiste l’essence de l’alliance traitée avec Abraham, par laquelle Dieu n’exige de lui autre chose, si ce n’est qu’il soit son Dieu et de sa semence. Comme le précepte de sanc­tifier le jour du sabbat ; d’autant que la sanctification du septième jour fut insti­tuée en mémoire de la création du monde parachevée dans six journées, ainsi qu’il appert de ces paroles de l’Exode, chap. XXXI. 17. C’est un signe entre moi et les enfants d’Israël à perpétuité ; car, en six jours, l’Éternel a fait les cieux et la terre, et au septième il a cessé et s’est reposé. De la troisième sorte sont les lois politiques, judi­cielles, et cérémonielles, qui ne regardent que les juifs tant seulement. Les lois des deux premières espèces furent écrites sur des tables de pierre, et nommées le Déca­logue, à cause des dix commandements qu’elles contiennent, que l’on conserva soi­gneusement enfermées dans l’arche : les autres, comprises dans le volume entier de la Loi, furent gardées à côté de cette même arche, Deuter. 3. 26. et pouvaient être changées en retenant la foi d’Abraham ; mais aux premières, il n’était point permis d’y toucher en aucune façon.


XI. Toutes les lois de Dieu sont une parole divine, mais toute la parole de Dieu n’est pas loi. Je suis le seigneur ton Dieu qui t’ai tiré hors de la terre d’Égypte, c’est bien Dieu qui parle, mais ce n’est pas une loi qu’il prononce. Et tout ce qui est proféré ou écrit ou déclarant la parole de Dieu n’est pas et ne doit pas être pris tout incon­tinent comme une partie de cette même parole. Car ces mots, par exemple, le seigneur dit ceci, ne sont pas mis dans les livres sacrés comme s’ils étaient sortis de la bouche de Dieu, mais ce sont des paroles que le prophète fait précéder en qualité de héraut et d’annonciateur de la volonté divine. Cela seul est la parole de Dieu dont un vrai prophète déclare que Dieu parla de telle sorte. Cependant les écrits des prophètes, qui comprennent tant ce que Dieu dit, que ce que le prophète ajoute, sont nommés la parole de Dieu, parce qu’elle y est contenue. Mais, d’autant que celle-là seule mérite ce titre, qui est annoncée par un vrai prophète, l’on ne peut pas connaître quelle c’est qui est véritablement parole de Dieu, que l’on ne sache auparavant quel est celui qui doit être reçu pour vrai prophète ; et il faut que la créance que l’on donne à ce dernier, précède la foi que l’on ajoute à ce qui sort de sa bouche, c’est-à-dire, il faut que l’on reçoive le prophète avant que l’on puisse croire à la parole de Dieu. Le peuple d’Israël crut à Moïse en considération de ces deux choses, de ses miracles et de sa foi ; car quelques grandes et évidentes merveilles dont il eût été spectateur, toutefois il n’eût pas dû lui croire, s’il l’eût tiré d’Égypte pour l’accoutumer à une autre