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ZUMALA-CARREGUI

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peu aisés. A l’époque de l’invasion des Français, i Il étudiait le droit à Pampelune ; aussitôt il quitta les bancs de l’université et s’engagea dans l’armée. Après avoir assisté à la première défense de Saragosse , il passa dans la troupe de Jauregui, et en 1813 il obtint le grade de capitaine. En 1822, privé de son emploi comme ultraroyaliste, il prit parti dans l’armée de la Foi, et reçut de Quesada le commandement du 2^ bataillon de volontaires de Navarre. Pendant cette campagne, il fut à même d’apprécier la régularité et l’ordre qui régnent dans l’armée française ; il en étudia de près l’organisation, et quand plus tard, après l’abolilion de la constitution, il fut nommé lieutenant-colonel au 1" léger (1825), il mit à profit les observations qu’il avait faites. Ses talents militaires lui firent donner successivement, avec le titre de colonel, le commandement du 3* léger, du régiment d’Estramadoure et du 14^ de ligne. Mais pendant la dernière maladie de Ferdinand VII il fut mis en disponibilité, à cause de son attachement à don Carfos, et obtint à grand’peine la permission de se retirer à Pampelune dans la famille de sa femme. Il était dans cette ville quand le roi mourut ( 29 sept. 1833). Cette mort donna le signal des hostilités entre les christinos et les carlistes. On offrit à Zuraala le rang de brigadier général s’il jurait fidélité à la reine Isabelle ; il le refusa, et, malgré la surveillance dont il était entouré, il parvint à s’échapper de nuit. Aussitôt il rejoignit les insurgés de la Biscaye et de l’AIava (30 oct.), qui étaient au nombre de quinze cents, et se mit à leur tête. Entouré de son célèbre bataillon des guides de Navarre, se renouvelant i-égulièrement tons les quatre mois par la mort, profitant même de ses défaites, harcelant les christinos, se laissant poursuivre par eux dans les défilés des montagnes, et les détruisant en détail, Zumala suppléait par son activité et son génie militaire aux immenses désavantages de sa position. Il reparaissait souvent aux lieux d’où il était parti la veille, après avoir fait dix-huit lieues dans la nuit. Dans ces marches fabuleuses, si ses soldats, pieds nus, murmuraient, le général descendait de cheval et, passant tranquillement la bride à son bras , il marchait infatigable à leur tête. Il serait trop long de le suivre dans cette guerre d’embuscades et de petits engagements. Il battit successivement Saarsfield, ValdèsetQuesada. Ce dernier fut remplacé par Rodil (juin 1834 ), le vainqueur du Portugal , qui arriva dans les provinces insurgées à la tête d’une armée de quarante mille hommes. L’armée carliste, décimée par la précédente campagne, manquait de tout : la prise d’une caisse de munitions équivalait pour elle au gain d’une bataille, et souvent Zumala avait dû renoncer à une victoire faute de cartouches. Cette position si précaire vint encore se compliquer par l’arrivée de don Carlos sur le théâtre de la guerre (juillet). Heureusement Zumala sut décider le prétendant à se séparer de lui et à parcouiir le pays sous la conduite d’Eraso pour amorcer l’ennemi et diviser ses forces. Rodil se laissa prendre à cette ruse, et se mettant à la poursuite de don Carlos avec douze mille hommes, iî laissa à Zumala le temps de battre ses lieutenants et de pousser une pointe jusque dans la Yieille-Castille. A bout d’expédients , le ministère fit alors sortir de sa retraite le vieux Mina (oct. 1834). Mais ce général , malade et obligé de se reposer sur des lieutenants, ne fut pas plus heureux que ses prédécesseurs. Zumala battit ses troupes à Alegria, près Vittoria (27 oct. ), et lui enleva deux pièces de canon. Mina comprit bientôt qu’il ne pouvait lutter avec un chef vigoureux et infatigable ; il donna sa démission après la prise d’Etcharri-Aranoz par l’armée carliste. Le ministre de la guerre Valdès lui succéda (7 avril 1835). Le système de temporisation adopté par ce général ne rétablit pas les affaires ; mais il eut la gloire d’introduire un peu d’humanité dans cette guerre sans pitié. Il signa avec Zumala une convention pour l’échange des prisonniers qu’auparavant on massacrait sans miséricorde. Pendant que les ministères se succédaient à Madrid, où l’anarchie était au comble, Zumala, maître de la campagne, assiégeait avec succès plusieurs villes. Enfin il attaqua Bilbao. Ce fut, dit-on, sur l’ordre du prétendant qu’il se détermina à cette entreprise ; il ei^t préféré se porter sur Vittoria. La garnison de la place étant supérieure en nombre aux assiégeants, il ne restait à ceux-ci qu’une seule chance de succès : c’était d’ouvrir une brèche et de tenter l’assaut. Lorsque la brèche fut ouverte, les munitions manquèrent, et il fallut différer l’attaque jusqu’au lendemain. Zumala était fort préoccupé ; il ne prit un peu de repos qu’après avoir envoyé à don Carlos une dépêche dans laquelle il disait que la disproportion des forces dont il disposait et de celles des assiégés le contraindrait sans doute à lever le siège. Puis il monta au premier étage d’une maison pour examiner du balcon la ligne ennemie (15 juin). Atteint d’une balle à la j’ambe droite, il se fit transporter àCegama ; don Carlos vint le voir, et lui envoya deux médecins. La blessure , qu’on croyait légère, s’envenima ; la balle fut extraite trop tard, et le malade succomba au milieu de cruelles souffrances. Il avait quarante-six ans, et ne laissait à sa femme et à ses trois filles d’autre bien que son nom. Ainsi mourut le héros des provinces basques, adoré des siens malgré sa sévérité et ses accès de colère, admiré même de ses ennemis. Quelque jugement qu’on porte sur la guerre carliste, on ne doit pas oublier que les Basques combattaient pour leurs libertés et leurs anciennes franchises. Ils rencontrèrent dans Zumala-Carregui le chef qu’il leur fallait, et lui obéirent avec un dévouement sans exemple. Tous les efforts de Zumala-Carregui tendaient à s’ouvrir la route de Madrid, et il est probable 33.