Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/177

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« Mon excellentissime conseiller spécial intime, dit le médecin en titre, après avoir tâté le pouls à Cinabre, vous vous sacrifiez au bien de l’état. Un travail trop assidu vous a jeté sur le lit de souffrance, des méditations trop ardues sont la cause du mal indéfinissable que vous devez éprouver. Vous avez la figure fatiguée et très-pâle, mais votre précieuse tête surtout est bien brûlante. — Haha !… ce n’est pas, j’espère, une inflammation cérébrale ? Le bien de l’état aurait-il amené d’aussi fatals résultats ? Ce n’est pas possible… Permettez ! — »

Le médecin avait sans doute aperçu sur la tête de Cinabre la même ligne rouge dont Adrian et Pulcher avaient fait la découverte. Après avoir essayé quelques passes magnétiques à distance et soufflé de diverses manières sur le malade, ce qui le faisait miauler et piailler lamentablement, il voulut passer sa main par-dessus sa tête, et eut le malheur de la toucher un peu rudement. Cinabre sauta tout-à-coup en l’air avec fureur, et de sa petite main osseuse il appliqua un si violent soufflet au médecin en titre, précisément penché sur lui, que toute la chambre en retentit.

« À qui diable en avez-vous ? s’écria-t-il en même temps, que patinez-vous ainsi autour de ma tête ? Je ne suis point malade, je me porte bien, je me porte à merveille ; je vais sur-le-champ me lever et me faire conduire chez le ministre pour le conseil. Fichez-moi le camp ! »

Le médecin en titre se sauva tout épouvanté. Mais lorsqu’il raconta au prince Barsanuph ce qui