Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/186

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Il présenta le livre à la chanoinesse, et elle ne l’eut pas plutôt touché, qu’il s’ouvrit de lui-même. Mais tous les feuillets se détachèrent en se développant sur les dimensions d’un in-folio monstre, et se mirent à voltiger avec fracas tout autour de la chambre.

La chanoinesse recula épouvantée. Alors le docteur referma le livre avec bruit, et tous les feuillets épars disparurent.

« Mais, ma chère et gracieuse demoiselle, dit Prosper Alpauus avec un doux sourire en se levant de son siège, à quoi bon perdre aussi notre temps à ces frivoles tours de passe-passe ? car ce que nous avons fait jusqu’ici n’est rien que de l’escamotage vulgaire. Passons plutôt à des expériences plus importantes.

» Je veux m’en aller ! dit la chanoinesse en se levant.

» Eh, eh ! dit Prosper Alpanus, cela pourrait bien exiger le concours de ma volonté ; car, ma gracieuse demoiselle, il faut que je vous le dise, vous êtes à présent tout-à-fait en ma puissance.

» En votre puissance, monsieur le docteur ? s’écria la chanoinesse avec colére. Quelle folie ! »

Et à ces mots, sa robe de soie s’étendit sous la forme de deux ailes, à l’aide desquelles elle se mit à voltiger près du plafond, transformée en un magnifique papillon manteau-de-deuil ; mais Prosper Alpanus se mit soudain à sa poursuite sous la forme d’un énorme cerf-volant, bourdonnant avec fracas. Épuisé de fatigue, le manteau-de-deuil se laissa