Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/305

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était arrivé plus d’une fois, à son grand déplaisir. Mais cette manière de faire passait chez lui pour la hardiesse ingénue d’un jeune homme naïf.

Le lendemain du bal chez le comte Walther Puck, Euchar reçut de grand matin un billet de son ami ainsi conçu :

« Cher et tendre ami ! je suis désolé, navré, perdu, abimé ! précipité du brillant pinacle des plus belles espérances dans le sombre abime d’un désespoir infini ! Ce qui devait m’assurer la plus suprême félicité fait mon malheur ! — Viens ! hâte-toi, viens me consoler, si cela n’est pas impossible. »

Euchar trouva son ami étendu sur un sopha, la tête enveloppée de serviettes, pâle et fatigué par l’insomnie. « Te voilà, mon noble ami ! lui dit Ludwig d’une voix dolente en étendant les bras vers lui. Oai, ton cœur est sans doute sensible par quelque endroit à ma douleur, à mes souffrances ! Laisse-moi du moins te raconter mon infortune, et prononce ensuite mon arrêt, si tu me crois réellement perdu sans ressource. »

Eachar reprit en souriant : « Les choses ne se sont-elles pas passées au bal, suivant tes prévisions ? » Ludwig poussa un profond soupir.

« La charmante Victorine, poursuivit Euchar, t’aurait-elle donc regardé de travers ? — Ah ! répliqua Ludwig d’un ton de voix tout à fait sépulcral, je l’ai mortellement offensée, sans espoir de rémission !

— Mon Dieu ! s’écria Euchar, comment cela s’est-il fait ? » Ludwig soupira encore d’une manière lamen-